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FIN DE L’ARENH.
Introduit par la loi sur la Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité (NOME) en 2010, l’Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique (ARENH) s’arrêtera en cette fin d’année 2025. À partir du 1er janvier 2026, exit le nucléaire à 42€/MWh : EDF vendra désormais la totalité de son nucléaire sur le marché suivant le niveau de prix de ces marchés.
Qu’EDF cesse de vendre son nucléaire à 42€/MWh, est-ce une mauvaise nouvelle ? Tout dépend du point de vue duquel on se place. Chez EDF, le dispositif de l’ARENH a toujours été vécu comme une spoliation, un dispositif asymétrique dans lequel d’autres tiraient les profits de leur travail, sans en porter les risques. Ainsi, entre 2015 et 2018, quand les marchés évoluaient en-dessous de 42€/MWh, tous les consommateurs et fournisseurs s’étaient détournés du système de l’ARENH, laissant EDF seul avec son nucléaire à vendre sur les marchés à un prix inférieur à 42€/MWh.
Pendant la crise de la COVID-19, même scénario : faisant jouer une clause de force majeure, confirmée par la justice, des fournisseurs alternatifs ont rendu à EDF le nucléaire acheté pour lequel ils ne trouvaient pas de débouchés. Cette asymétrie de l’ARENH a ainsi été au cœur des débats : pourquoi EDF devrait porter systématiquement pour son nucléaire les risques à la baisse des marchés mais pas les bénéfices à la hausse ? Le dispositif de l’ARENH arrivait à bout de souffle et semblait condamné.
Stopper ce dispositif ne sera toutefois pas sans effet pour les consommateur. Contrairement à ce que certains politiques ont avancé pendant la crise en prétendant que l’ARENH ne profitait pas au consommateur et ne faisait que ruiner EDF, l’ARENH se retrouvait bien dans les factures des consommateurs et les difficultés financières d’EDF pendant la crise n’étaient pas dues à ce dispositif mais à la faible disponibilité du parc nucléaire.
Ainsi, l’UFC Que Choisir a calculé que si l’ARENH avait disparu dès cette année, les factures des particuliers seraient 19% plus élevées. Ce chiffre est toutefois trompeur car la fin de l’ARENH en 2026 devrait être compensée par la baisse des prix de marché, tant et si bien que le tarif régulé des particuliers devrait en fait être stable l’an prochain. Cependant, certains industriels s’alimentant principalement avec l’ARENH devraient bien voir leurs factures augmenter.
Le nucléaire à 42€/MWh est terminé, pour les concurrents d’EDF comme pour les clients au tarif régulé ou ceux en offre de marché chez EDF. Par conséquent, le nouveau système, hors crise, sera moins avantageux pour le consommateur qui ne profitera plus d'un prix obsolète du nucléaire. Le remplacement par un système de taxation/redistribution, dont il n’est pas encore sûr qu’il fonctionne bien, reste à préciser. Dans toute cette discussion, il n’est pas possible de dire en même temps qu’EDF doit s’assurer des revenus confortables pour réaliser ses investissements et qu’en même temps, les consommateurs doivent bénéficier de prix les plus bas possible : tout est une question d’arbitrage.
Pour l’avenir, trois questions restent en suspens. La première est de savoir comment EDF pourra assurer sa stabilité financière si les prix de marché chutent, ce qui pourrait arriver en cette période de faible consommation électrique et d'abondante production. Avec une vente au marché, EDF pourrait certes dégager des profits en période de prix haut mais n’est en rien protégé contre une période de prix bas. La deuxième serait de préciser le mécanisme de taxation et de redistribution. En l’état, les articles de loi votés restent largement sujets à interprétation sur les niveaux de taxation et les modalités de redistribution sont indéfinies. Il n’est d’ailleurs pas acquis que ce système soit efficace, compte tenu du décalage potentiel entre une hausse de marché, la taxation d’EDF et la redistribution aux consommateurs. Enfin, dernière question et pas des moindres : comment faire pour que tous les consommateurs payent un juste prix au regard leur besoin ? Un ménage aisé ou une banque peut parfaitement s’acquitter d’une électricité autour de 70 €/MWh sans que cela ne pénalise son activité. Ce n’est en revanche pas le cas d’une aciérie ou d’un chimiste soumis à la concurrence internationale dont les coûts d’approvisionnement en électricité détermine directement la pérennité de l’activité.
Extrait d’une tribune signée Nicolas Goldberg